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Après la mort
Photographies (A.J.) : Alexandre JACQUEAU Portraits de soldats Le front Le combat Les destructions  

 

 

 

 

Le Sous-Lieutenant

Alexandre-Louis JACQUEAU

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Tiré à 500 exemplaires

non mis dons le commerce

 

LETTRES DE GUERRE

Le Sous-Lieutenant

Alexandre-Louis JACQUEAU

(1877-1915)

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AVEC PORTRAITS

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Préface du R. P. Raymond Louis, O. P.

 

¢¢¢¢¢¢¢

BOIS-COLOMBES

lmprimerie COURTOIS

34, Rue Henri-Litolff

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1921

 

PRÉFACE

________

 

Au cours de la guerre, une enquête fut ouverte par un journal du front. Elle avait pour objet de déterminer le meilleur moyen de conserver la mémoire de nos morts et de la glorifier. Une des réponses qui y furent faites proposa de fonder des archives où, pieusement, seraient recueillies leurs lettres.

La présente publication qui, d’ailleurs n’est pas destinée à être mise dans le commerce, donne satisfaction à ce désir : l’âme du lieutenant Alexandre Louis Jacqueau y apparaît dans toute sa beauté et toute sa noblesse, avec un grand charme de nature.

Comme tant de Français, Louis Jacqueau est l’homme de la famille et ses lettres nous le montrent profondément attaché à tous les siens. Mari parfait, père de famille excellent, il ne croit pas que les sentiments qui débordent de son cœur le dispensent des autres devoirs de piété que lui ont créés les liens du sang ou ceux de la parenté. Avec quelle sollicitude il s’informe de ceux qui le touchent de près, s’inquiète de leur sort, entend être bien renseigné sur l’endroit où ils sont et sur ce qu’ils font. Il tient à demeurer au courant des moindres petits faits de leur vie quotidienne ; avec amour il se les représente à leur foyer, à son foyer à lui, et en même temps il se plaît à dépeindre, à ceux qui lui sont chers, sa vie ou tout au moins ce qui, dans sa vie, peut les rassurer, calmer leurs alarmes, soutenir leur courage et leur faire prendre patience. Il n’affecte pas, néanmoins, des airs de stoïcisme et il laisse voir parfois, avec simplicité, que son cœur à été sur le point de défaillir, en se sentant si loin des siens et depuis si longtemps.

Il est aussi, et comme tant de Français encore, profondément catholique. Cette note, dans sa correspondance, n’est pas moins nettement marquée que la précédente : elle l’est même en traits plus appuyés, comme il est naturel de la part d’un converti et d’un converti tout récent. Certes, il ne faut pas le ranger au nombre des convertis de la guerre, de cette légion de jeunes gens et d’hommes mûrs chez qui les sentiments religieux, comme les sentiments patriotiques, assoupis par les douceurs de ia paix, se sont réveillés si purs et si héroïques, quand a retenti l’appel aux armes. Il peut faire remarquer avec insistance et non sans fierté, que la mobilisation n’était pas déclarée quand il revint aux pratiques de son enfance et que cette préoccupation n’eut aucune influence sur son retour à Dieu. Néanmoins celui-ci n’eut lieu qu’au mois de juillet 1914 ; sa conversion était donc de fraîche date quand il revêtit l’uniforme.

Elle tut le terme d’un long travail d’âme. Au sortir de l’enfance, il s’était établi dans un état d’indifférence pratique, puis il laissa prendre tout son temps par les affaires et il pouvait sembler à ceux qui le fréquentaient, sans entrer dans l’intimité de son âme, que les questions religieuses ne l’intéressaient pas. Il était loin d’en être ainsi. Son âme était trop avide d’idéal, trop éprise d’honneur et de beauté pour ne pas se sentir attirée, comme par une sorte d’instinct spirituel, vers les choses religieuses. Tantôt apaisé et respectueux du catholicisrne, tantôt révolté et en apparence hostile, il ne cessait, en réalité, d’y penser. En 1912 déjà, un de ses amis ayant remarqué incidemment devant lui que tout ce qui touchait à la religion le laissait froid, il répartit assez vivement : « Pour moi, il n’en est pas ainsi : les questions religieuses me remuent singulièrement. » À qui pouvait lui répondre, il lui arrivait souvent de demander, vers la même époque, qu’on lui prouvât que la religion rend meilleur et qu’on lui montrât comment prie une âme fidèle. Il espérait que ce spectacle l’amènerait à la foi.

L’heure de Dieu n’avait pas encore sonné ; néanmoins elle approchait, à son insu.

Un jour, au plus fort de la lutte qu’il soutenait contre lui -même, il alla visiter une maison de campagne qu’il désirait acheter et dont le propriétaire était, lui avait-on dit, un chanteur de café-concert. La réception que lui fit celui-ci fut fort aimable et, après-les premiers pourparlers, la conversation prit rapidement un tour religieux qui le surprit profondément. Aux questions qu’il posa à l’acteur, celui-ci répondit très simplement qu’il s’était converti en cet endroit et qu’il songeait même à entrer dans les ordres. À son tour, M. Jacqueau avoua son désir de croire et révéla la lutte qui se livrait en lui. Il partit de là avec quelques conseils. Rentré à Paris, il lut un livre qui fit sur lui, comme il avait fait sur celui qui venait de le lui indiquer, une impression profonde : « le Vieillard » de Mgr Baunard.

La grâce continuait lentement son œuvre. Peu de temps après, Mme Jacqueau lui ayant parlé d’une très belle image du Sacré-Cœur que venait de recevoir une de ses amies, sans en rien lui dire, il alla en commander une semblable pour elle. Celle-ci la plaça, pour le mois de juin 1914, au centre d’un petit autel qu’elle dressa pour ses enfants et elle eût la joie, au commencement du mois suivant, d’entendre son mari lui dire: « Il me semble que je vais croire » et lui révéler qu’au dernier jour de ce mois du Sacré-Cœur, il avait récité, à son tour, une prière devant l’autel et que tout d’un coup la lumière s’était faite en son âme. Il demanda alors à voir un prêtre. Celui dont il prononçait le nom se trouvait absent pour quelques jours. M. Jacqueau avait maintes fois déclaré « Peut-être un jour croirai-je, comme je le désire; mais la confession, jamais ! » Néanmoins pressé d’en finir, il se rendit par trois fois dans une église de Paris pour se confesser : les trois fois il hésita et repartit sans avoir réalisé son désir. Mais Dieu fut le plus fort : le vendredi 24 juillet, il rencontrait le prêtre qu’il désirait voir et comme celui-ci, incomplètement instruit de tout ce qui venait de se passer, s’inquiétait de savoir quelle obscurité pouvait demeurer encore en son esprit, il lui demanda simplement la permission de se mettre à genoux pour se confesser. Le dimanche suivant il communiait, aux côtés de sa femme, dans la chapelle des Carmélites de Pontoise et, de retour chez lui, apprenait que la situation politique était extrêmement tendue et que la guerre était menaçante.

Sa foi et sa charité ne firent dès lors que grandir et c’est à une admirable et émouvante ascension d’âme que ses lettres nous font assister. Puisse leur lecture entraîner d’autres âmes à la suite de cette belle âme qui à maintenant accompli sa destinée et qui jouit pleinement, nous l’espérons, de cette vérité qu’elle à passionnément cherchée sur cette terre et plus passionnément encore aimée et servie, quand elle se fut révélée à elle.

FR. R. LOUIS, O. P.

 

 

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