1er Mai.
Aujourd’hui ce n’est pas une fleur que je joins à ma lettre, mais une photographie en tenue de campagne. J’espère qu’elle te fera d’autant plus de plaisir qu’elle est moins préparée. Photo d’amateur prise par un de nos mitrailleurs. Je n’en ai qu’une, montre-la à Mère, mais j’espère en avoir d’autres et même peut-être le cliché que je t’enverrai. Tu me trouveras probablement quelque peu changé corporellement, mais pour un vieux territorial de 40 ans, je ne me porte pas encore trop mal et les neuf mois de campagne ne se font pas encore trop sentir. Pourtant par moment, comme dirait le poilu : Un peu fatigué et j’en ai marre... Cette photo à été prise le 28, un peu après le bombardement dont je t’ai causé sur nos tranchées. Comme tu le vois, ceci ne nous influence pas trop, du reste, lorsqu’il a commencé, nous n’avions que la moitié de la Compagnie en ligne dans les tranchées, l’autre jouait au foot-ball dans un repli de terrain. Ah ! Ces Français, quelle insouciance... Enfin, pour le moment cela fait leur force. Un peu plus de discipline et surtout de méthode et ce serait presque parfait. - Depuis deux jours je n’ai aucune nouvelle de toi, mais avant de partir pour la nuit à la belle étoile, j’aurai probablement deux lettres. J’attends ce moment avec impatience. Ici rien de nouveau, aujourd’hui c’est assez calme, demain nous ne pourrons peut-être pas en dire autant car les Boches sont assez généreux en projectiles et nous arrosent copieusement. De plus ils sont assez actifs et nous ennuient bien avec leurs travaux de sape... Ah ! Ils nous l’imposent leur guerre et nous forcent à l’apprendre, quoiqu’elle soit peu dans nos goûts. Mais ils savent le faire et ont une discipline... merveilleuse. Avec eux personne ne bouge, les villages paraissent inoccupés, l’on ne voit âme qui vive ; dans leurs tranchées pas une tête ne dépasse, l’on reste des journées entières face à face sans en voir un. De notre côté, l’insouciance la plus complète... des gosses... des enfants... Insouciance merveilleuse, mais néfaste. Lors du bombardement dont je t’ai causé et qui pouvait compter, il y eût quelques obus boches qui n’éclatèrent pas et s’enfoncèrent dans la terre, aussitôt nos poilus se redressaient et poussaient des Hou ! Hou ! Pour embêter les Boches qui étaient à 250 mètres de nous. Voilà bien nos poilus. En ce moment nous avons un maître d’hôtel épatant, il est de Brive et fait habituellement des extras. Avec rien, il nous fait des choses succulenles, pets de nonne... sans lait et au saindoux, crêpes... idem... épatantes, donne la recette à Mère. Je vois sa figure d’ici. Enfin, à la guerre comme à la guerre... si nous en mangeons de meilleures après.
2 Mai 1915.
Reçu hier ta bonne lettre du 27, ainsi qu’une carte de Paulette du 30. Un jour pour venir au front. C’est merveilleux, la poste à dû se tromper. ...Ta réflexion m’a fait sourire : « Heureusement que je ne suis pas jalouse, car vraiment en ce moment j’aurais trop de quoi. » Erreur, ma Pauvre Grande, je mène une vie de Chartreux. D’abord les femmes sont rares, nous n’avons pas aperçu un jupon depuis le 1er avril et puis... et puis... sois tranquille, cela ne me tente pas du tout. On pense bien peu à cela ici... Les réflexions sont tout autres... - Ce que tu me dis pour Georges ne m’étonne pas. Il est déplorable qu’on le traite ainsi d’ambulance en ambulance. Mais il ne faut pas confondre l’autorité militaire avec le service de santé. Celui-ci a été et est au-dessous de tout. Les majors ne pensent, en général, qu’à bien vivre et à en faire le moins possible. Les médecins-majors de réserve valent encore moins. À la plupart de ceux-là, je ne saurais trop dire mon mépris. Du reste, que ce soit ici ou dans la vie civile, la vie d’un moribond compte, en général, si peu pour eux. Enfin, passons... - Nous venons d’être appelés chez le Colonel, grande nouvelle, à partir du 6, la brigade de marche est reconstituée avec d’autres éléments, nous rejoignons notre régiment pour le B... des C..., probablement, ou ailleurs, mais par là certainement.
4 Mai 1915.
J’ai reçu les deux images, c’est parfait, Je viens d’écrire et de les envoyer à Jacques et à Maurice J’espère qu’elles arriveront à temps, c’est tout ce que je peux faire pour aujourd’hui et encore j’ai eu bien du mal pour trouver un moment. Tout va très bien, je suis en parfaite santé, ne t’inquiète pas. Je ferai mon possible pour t’écrire plus longuement cet après-midi.
6 Mai 1915.
Comme je te l’ai dit nous avons été relevés hier, nous avons fait une marche de 20 kilomètres, sous bois, fort pénible car les pluies des deux jours précédents avaient rendu le sol fort fangeux et il faisait une chaleur atroce. Arrivés à un point donné, nous avons trouvé un convoi d’autos qui a emmené tous le bataillon et nous a ramené ici, B... des C... J’aurais voulu que tu vois la joie de nos poilus. Jamais nous n’avons eu une pareille aubaine. Moi-même, j’étais fort heureux, depuis neuf mois je n’en avais pas fait autant. Assis à côté du chauffeur, j’étais content de sentir le vent me fouetter la figure, ah ! la bonne odeur de pétrole, d’huile sur-chauffée... Comme les idées changent suivant la situation... - Nous voilà donc revenus sur nos emplacements et allons reprendre la vie de tranchées... Quel cauchemar... Enfin... Quand finira donc cette guerre ? Il y a des endroits où nous aurons bien du mal à les déménager ces barbares, et nous ne pouvons rien malgré toute la vaillance tout le courage, toute la volonté des troupes. Ces Boches ont des abris à deux étages. Communiquant entre eux par des boyaux souterrains, leurs abris sont recouverts de 3 ou 4 rangées de rails de terre, comment veux-tu sortir de là ? Rien à faire. Là où le sol le permet ces Barbares ont fait des abris inexpugnables. Enfin, efforçons-nous de mériter afin que Dieu nous vienne en aide et abrège toutes nos souffrances, car c’est long... long et bien dur. ...Je te quitte, ma chère Petite Femme, surtout ne t’inquiète pas et ne pense pas trop à moi dimanche (1ère Communion de Jacques et de Maurice.) Quant à moi, je ne veux pas y songer d’avance car j’ai le cœur bien gros... Enfin, le devoir est là...
7 Mai 1915.
Je suis sans nouvelles de toi depuis trois jours, mais j’espère en avoir ce soir, surtout écris-moi toujours bien régulièrement, ici plus qu’ailleurs, j’ai besoin d’avoir des nouvelles, car rien que de penser que nous sommes revenus ici, j’en ai le cafard. Nous sommes au repos jusqu’à dimanche matin... à la cave comme toujours. Hier, ayant voulu profiter d’un rayon de soleil nous nous sommes faits bombarder. Force nous fut de réintégrer le noir. Je ne doute pas que tu m’aies écrit, mais c’est encore un tour de la poste et comme toujours au bon moment. Tout va bien à part cela, ma santé est excellente, pas d’évacuation possible ni en perspective. Pas le moindre rhumatisme. Je fais une cure, mais un peu trop longue à mon gré. Enfin, il faut toujours et toujours de la patience. Je crois qu’on pourra dire que nous en avons eu. ...J’espère que tu me raconteras comment se sera passée votre journée de dimanche. Combien je vais penser à vous.
8 Mai 1915.
...Je suis heureux de voir que les enfants se sont bien amusés à Orry. Oui, où est le bon temps où nous allions cueillir des fleurs ensemble ! Mais il reviendra, espérons-le. - Je suis content que tu aies reçu ma photographie et qu’elle t’ait fait plaisir. Il est certain que j’ai maigri et que l’empâtement des traits a un peu disparu, néanmoins, quoiqu’en bonne santé, je suis parfois bien fatigué et je ne rajeunis pas. ...Tu me dis que mes lettres paraissent plus tristes. Comme je te l’ai dit maintes fois, elles subissent l’influence du moment et comme ceux-ci ne sont pas toujours gais..., elles peuvent s’en ressentir. - Tu me poses des questions auxquelles il m’est difficile de répondre. Je dis que la guerre peut durer encore longtemps car la tentative qui vient d’être faite de nos côtés a prouvé qu’il valait mieux laisser le temps travailler pour nous et probablement attendre l’entrée en lice des neutres. C’est du reste la pensée de Joffre qui sait très bien que de part et d’autre, il n’y a rien à faire pour le moment et qui estime avec juste raison qu’il faut garder des bras à la France pour qu’elle puisse se relever physiquement et économiquement après la guerre. Le parti franc-maçon, S... a voulu prouver que sa tactique ne tenait pas debout et que l’offensive était possible sans pertes trop grandes. Dégommer Joffre et le remplacer par S... La tentative à lamentablement échouée. Nous n’avons pas gagné grand’chose et l’essai que nous avons fait depuis un mois dans la W... nous a coûté le chiffre respectable de 42.000 hommes tant tués que blessés. La manchette des journaux à été brève et les communiqués bien courts pour un pareil sacrifice. L’histoire seule enregistrera ce qui s’est passé. La position de J... s’en est raffermie. Oui, il faut attendre. Les Alliés achètent actuellement l’Italie, les neutres et peut-être même la Turquie. Depuis neuf mois nous jonglons assez avec les milliards pour ne pas regarder à quelques milliards près. Armons-nous donc de patience, l’Italie va très certainement se mettre de la partie et les autres suivront : cela changera la face des choses. Il est certain qu’il est dur pour notre amour-propre de ne pouvoir mettre ces bandits hors de France, ceci serait fait si, après la bataille de la Marne, nous avions eu des canons et des munitions. Malheureusement, nous n’étions pas prêts et la gloire de Joffre et de la France sera d’avoir maintenu les hordes barbares à nous seuls, d’avoir subi le plus gros choc qu’ait enregistré l’histoire et d’avoir su se créer, réparer, organiser ce qui ne l’était pas. L’effort anglais est minime à côté du nôtre. Quant aux Boches, ils n’étaient pas plus prêts que nous, leur grand réservoir d’hommes ne peut être employé. Patientons donc, efforçons-nous de mériter la miséricorde divine, faisons notre devoir coûte que coûte, ne récriminons pas et mettons toute notre confiance dans le Bon Maître. Lui seul peut nous venir en aide et mettre fin à cette calamité déchaînée par l’orgueil et le désir de jouissance des hommes.
9 Mai 1915.
Me voici aux avant-postes depuis ce matin 3 h. 1/2 et pour 4 jours... Je respire quoique dans mon terrier. Par le trou de la porte, j’aperçois un petit coin du ciel bleu et un petit coin de verdure. Et puis, ici, nous avons au moins un peu d’activité. La proximité des Boches et toute la série d’envois que nous nous faisons réciproquement servent de stimulant. Je suis prisonnier quand je le veux, si non, mon secteur est étendu et je vais de tranchées en tranchées par les boyaux. On a beaucoup travaillé en notre absence. Vous ne pouvez vous imaginer ce qu’est cette existence de taupes et ce que nos hommes arrivent à faire... De la caponnière qui est mon poste, nous avons fait un véritable fortin. C’est une petite merveille dans son genre et dire que lorsque je suis arrivé ici en février il n’y avait rien, rien. Il est certain que pour ceux qui ne sont pas sur le front, ils resteraient ébahis. - Tu riras en voyant certaines photos que j’ai prises, car nous transportons dans nos postes les objets les plus indispensables, vases de nuit ou autres. De plus, quelquefois nous n’engendrons pas la mélancolie, à côté des fichus quarts d’heure il y a quelques bons moments. - Aujourd’hui, fichu quart d’heure, je vous sais tous réunis et pour une fête à laquelle j’aurais eu beaucoup de bonheur à assister. Avoir dorloté ces enfants comme je l’ai fait, et ne pas les voir en ce beau jour qui laisse tant de traces et de souvenirs ! Mais, je ne veux pas trop y penser, car mon cœur est bien gros. Les Boches vont se charger de me distraire. Je viens d’entendre le départ et l’arrivée de quatre torpilles, c’est le commencement de l’orage. ...Je préfère être ici, aux avant-postes, qu’à la cave, hier il était question de me changer de secteur. Ce matin l’on m’a remis à une caponnière et j’en suis heureux car c’est un peu, beaucoup mon œuvre et je l’aime comme un marin son bateau. Mais au reste personne ne me la dispute, l’on y est trop près des Boches, c’est l’endroit où les lignes sont le plus rapprochées et il est assez mal réputé. Lorsqu’il a été question hier de me changer, je n’aurais rien fait pour y retourner, mais puisque l’on m’y a remis, j’en suis très content.
10 Mai 1915.
...Ai-je besoin de te dire combien j’ai pensé à vous tous en cette journée du 9, et combien seul, et agenouillé dans ma cagna, j’ai prié pour Jacques et Maurice, demandant au Bon Maître et à notre Bonne-Mère de leur accorder la grâce de faire une bonne Première Communion et celle non moins grande de persévérer. Puissent-ils avoir reçu le Seigneur avec amour et y avoir trouvé un gage de salut éternel. Le courrier du soir a apporté avec la tienne, les lettres de Paulette et des enfants, ainsi que leurs deux images. J’ai sangloté. « Mon Dieu, que c’est dur d’être séparé des siens, mais que votre volonté soit faite, car je sens trop bien que vous avez usé de ce moyen pour achever mon retour complet à la Foi, éprouver ma persévérance et me faire désirer votre Saint Amour » Oui, j’ai pleuré, bien pleuré, mais vous étiez là, je n’étais pas seul, l’Ami m’a consolé. Tout comme toi, ma Bonne Suzanne, j’ai communié à leur intention, mais vendredi et samedi, car hier j’étais aux avant-postes à 3 h. 1/2 du matin. Comme je te le disais hier, ici je suis plus heureux que durant mon séjour à la ferme d’A... Je suis avec mes hommes quand j’ai besoin d’y être, sinon je reste dans mon terrier seul, et j’aime cette solitude que les éclatements d’obus, bombes, grenades et torpilles ne troublent même pas. Comme je te l’ai dit, je mène ici une vraie vie de Chartreux et je comprends combien ceux qui ont cette vocation y doivent trouver de charme. Du reste, cette solitude n’est qu’un mot, elle n’existe pas. L’Ami me fait expérimenter la parole : « Viens dans la solitude et je parlerai à ton cœur. » - Merci à ma Madelon et à mon Jean pour la belle petite rose qu’ils m’ont envoyée. Je vais leur écrire. Embrasse-les tous deux avec toute la tendresse que je dépose ici entre ces lignes.
13 Mai 1915.
J’ai reçu hier soir tes bonnes lettres et cartes du 10, ainsi qu’une lettre de Mère du 7, bien content d’avoir des nouvelles. Merci des détails que tu me donnes sur la journée du 9. Je ne doute pas que nos communiants étaient bien gentils. Combien j’aurais voulu les voir ainsi que mes chers Petits et l’ami Pierrot. Nous avons quitté le B... des Caures ce matin à... heures et nous voilà revenus en cellule pour quatre jours. Le premier a bien commencé, c’est l’Ascension et en arrivant, j’ai pu assister à la Sainte-Messe et communier. J’aurais voulu prendre la photographie de la cérémonie, dans cette grange dont la toiture est percée par les obus, cette Messe à un cachet tout particulier et l’impression qui s’en dégage est prenante. Nous avons un harmonium et voudrais que tu voies avec quel cœur nos hommes entonnent les cantiques. Malheureusement le jour y est mauvais, il n’était que 7 h. 1/2 et un instantané n’était pas possible, ...Hier, j’ai eu la visite d’officiers du génie de l’Etat-Major général. Quand je leur ai montré au travers des créneaux la tranchée boche à 10 mètres, ils ne pouvaient en croire leurs yeux et quand les torpilles et bombes se mirent de la partie, quelques-uns d’entre eux ne paraissaient pas très fiers. Nous n’y pensons pas, nous, question d’habitude. Parmi eux se trouvait un capitaine, inventeur d’une bombe à la cheddite que nous employons. Je lui ai offert le spectacle d’une démolition de tranchée boche avec les projectiles de son invention. Ils étaient étonnés que je ne fasse pas abandonner ma tranchée car lui-même n’avait jamais pu régler un tir exactement. Je lui dis que j’y arrivais à 4 ou 5 mètres près, lui, parlait de 40 à 50 mètres. Il fut épaté, à la 4ème bombe, la tranchée volait. Il était si content qu’il a donné 3 francs à mon bombardier et m’a promis de faire un rapport à l’artillerie de la place. Nous leur avons offert un autre spectacle, 40 obus de 75 sur des tranchées boches à 30 mètres des nôtres. Jamais il n’avait exécuté un tir aussi près. Je t’assure qu’il ne faut pas avoir peur ; quand on songe que la pièce tire à 2.500 mètres, il faut vraiment en être sûr, car il suffirait d’une erreur de pointage insignifiante pour que les obus viennent chez nous. D’autant plus qu’il faut bien s’imaginer que cette pièce est casematée, tire dans un bois et qu’elle ne voit pas l’objectif ; de plus l’endroit d’où elle tire est perpendiculaire aux tranchées boches et par conséquent aux nôtres qu’elle prend en enfilade. C’est absolument merveilleux comme tir. L’éclatement du 75 est tel que même derrière les créneaux, à 30 mètres, nous étions suffoqués. À la fin de la séance nous avions comme le cœur décroché. ...Parmi les photos que je t’envoie, j’ai pris deux éclatements d’obus de 75, justement hier, monté sur mon abri, je les ai pris à 40 mètres environ. Ces clichés vont paraître bizarres à celui qui les développera et ressemblent à un nuage ou à une plaque voilée. Recommande-les spécialement car ceux-ci sont rares, surtout à cette distance. ...Je t’ai demandé un pantalon en coutil bleu, je tiens à cette teinte, car elle est règlementaire et tous ceux qui sont pris par les Boches dans une tenue autre (pantalon de velours marron, par exemple) sont considérés comme francs-tireurs et fusillés. Il fait bon d’ouvrir l’œil.
14 Mai 1915.
Pas de lettre hier au courrier. La poste me joue encore des tours. Après les beaux jours que nous avons eus, voilà le temps qui se remet encore à la pluie. Quel ennui, mais combien je préfère malgré tout qu’il pleuve ici que lorsque nous sommes aux avant-postes. D’après les prisonniers boches faits récemment le B... des C... a très mauvaise réputation parmi eux. C’est un peu leur tour, nous y avons souffert assez longtemps, plus qu’eux. Il est certain qu’avec les rations de bombes à la cheddite et de 75 que nous leur distrihuons, ils ne doivent pas y être très heureux. ...J’apprends qu’un taube a survolé St-Denis et qu’il a causé quelques accidents. Donne-nous des détails. Les bombes sont tombées rue de Paris. Est-ce près de la maison ? Recommande aux enfants et à tous que dès qu’ils voient un aéroplane ils se mettent à l’abri et non le nez en l’air. Ici dès qu’un avion passe, nos hommes n’ont pas à s’inquiéter de quelle nationalité il est, ils doivent se mettre à l’abri.
14 Mai 1915.
Merci des quelques détails que tu me donnes sur la visite du taube sur St-Denis, justement je t’en demandais par ma lettre de ce jour. Mais tu m’as fait rire de m’avoir mis une carte pneumatique, ce service, hélas n’est pas encore mis en pratique jusqu’à la zone des armées. À part ce petit mot, je suis sans nouvelles depuis quelques jours.
…J’étais content d’être au repos ce matin, car cela m’a permis d’aller à la Messe et de communier. En l’honneur de Jeanne, beaucoup de communions, le colonel lui-même, il est du reste très pieux. C’est un homme très travailleur et très capable qui a vu sa carrière enrayée à cause de ses opinions. Ceci est d’autant plus malheureux que c’est un très brave homme, tenant beaucoup à l’existence de ses hommes et qui n’irait pas en sacrifier pour avoir l’honneur d’être au communiqué. Beaucoup n’ont pas autant d’e cœur et n’y regardent pas de si près. La messe dans la grange était très bien, malheureusement notre prêtre-infirmier n’est pas très éloquent. Il y avait pourtant de si belles choses à dire. Nous avons chanté la cantate « À l’Étendard ». La section H. R. avait organisé un chœur. Hier, le colonel voyant la compagnie rassemblée m’avait fait dire d’en profiter pour parler aux hommes de Jeanne d’Arc et de son rôle. Mais, nous avons un commandant de Compagnie si original que j’ai préféré le laisser en causer. C’est un sectaire fini, mais quoique peu d’accord, j’ai sur lui beaucoup d’influence et je dois l’avouer, ceci pour le plus grand bien des hommes. Je t’envoie ci-joint trois photographies prises à G... dans le parc du château. Nous avons été invités par le Sous-lieutenant auquel je verse à boire, garde-les moi, l’une représente une tranchée au B... des C... Cette photo a été prise au moment d’un bombardement du château par des 105, tu vois que nous n’avions pas l’air bien triste et pourtant toutes les fusées venaient voler autour de nous.
16 Mai 1915.
Je t’ai écrit ce matin longuement. Cet après-midi je suis allé promener avec quelques camarades dans les bois. Ceux-ci sont superbes et embaument le muguet. J’étais émerveillé mais parti gaiement j’en reviens affreusement triste. Quand reverrons-nous le lieu où nous allions avec les enfants, ma Madelon et mon Jean, courir dans les forêts de l’Isle-Adam et de St-Martin-du-Tertre ? Mon Dieu que c’est dur de vivre ainsi loin et séparé de ceux qu’on aime tant ! Comme j’étais occupé à cueillir du muguet, un obus allemand de 105 vint éclater à une trentaine de mètres de l’endroit où j’étais. Obus stupide qui va taper, sans but appréciable et mort encore plus stupide et sans résultat que celle-là. - Recevoir une blessure à son poste ou dans une attaque, soit, mais de cette façon... Je t’envoie ci-joint, trois petits brins de muguet. Au revoir, ma Bonne Grande, pardonne-moi de te faire part de ma tristesse, mais cette promenade m’en rappelle tant d’autres et je me sens si seul et si loin.
17 Mai 1915.
Je suis depuis ce matin à mon poste et comme toujours m’y trouve beaucoup mieux qu’au repos. L’activité que l’on a ici fait passer les heures et chasse l’ennui. Ah ! S’il y avait des jumelles qui permettent de voir comme vous seriez surpris de l’existence que nous menons. Tout ce qu’on a pu dire et tout ce qu’on dit est au-dessous de la vérité. Tous ceux qui viennent nous voir, officiers d’état-major ou autres sont surpris. C’est une situation peu banale.
18 Mai 1915.
Je ne puis t’écrire longuement aujourd’hui, mais ne t’inquiète pas, je suis en parfaite santé. Nous avons un temps épouvantable. Remercie Mère de sa bonne lettre, mais je n’ai pas le temps de répondre. Écrivez-moi souvent.
19 Mai 1915.
Encore un mot pour aujourd’hui. Excuse-moi auprès de tous car je n’ai pas une minute pour écrire. Nous avons un temps épouvantable ; j’ai pu mettre un mot hier à Georges, Il vous donnera plus de détails. Je suis en très bonne santé et toujours solide et vaillant. ...Je t’écris cette carte sur un manche de pelle. Stabilité parfaite.
20 Mai 1915.
Depuis quatre jours, il m’est impossible de t’écrire, nous venons de passer des journées bien dures. Bombardement continuel et toute la gamme. Enfin ne t’inquiète pas, je suis en parfaite santé et sais réagir contre les moments d’ennuis inévitables Qui ne les comprendrait pas ? Malgré tout, c’est quelquefois bien dur et l’on se demande s’il est possible de sortir indemne de cette fournaise. Mais, mieux vaut ne pas penser à cela, car lorsque le danger est passé, l’on reprend sa gaieté et l’on rit comme de grands gosses énervés, on rit même de ses ennuis. Ce matin, comme je faisais prendre les armes à mes hommes, 3 heures du matin, j’ai eu la visite du général de Division, très aimable, qui à paru très content de l’organisation de mon secteur et m’a serré la main au départ et à l’arrivée. Nous avons, en effet, beaucoup travaillé et travaillons beaucoup, dans quelles conditions ! Je voudrais que tu vois ce que j’arrive à obtenir de mes hommes, ces gens-là sont merveilleux lorsqu’on sait les prendre... et j’ avoue que j’éprouve là une grande satisfaction. Voilà le départ du courrier, je te quitte. Ne t’inquiète pas, ayons confiance et prions.
21 Mai 1915.
Nous avons été relevés ce matin à 4 heures et n’en sommes pas fâchés car nous avons passés quatre journées très dures, très déprimantes et très pénibles par les blessés et les morts que nous avons eus. Hélas ! Tout comme toi, j’apporte à mes malheureux camarades les premiers soins et les premières paroles de réconfort et de consolation. Mais c’est quelquefois dur, bien dur; à ces moments j’élève alors mon âme vers Dieu, heureux de lui offrir tous ces sacrifices et j’éprouve l’intime satisfaction d’avoir soulagé mon prochain et la sertitude d’avoir été agréable au Bon Maître. Avant-hier, c’était un malheureux qui avait une fracture du crâne, provoquée par un éclat d’obus, hier, c’était un pauvre diable a la face sanguinolente et qui avait des plaies multiples à la tête et à la gorge, produites par l’explosion d’une bombe boche. Quel dur métier que celui de l’officier actuellement, mais par contre, quel ascendant il peut prendre sur ses hommes. Néanmoins il est des heures atroces, où l’on douterait presque de soi, il faut alors réfréner la bête humaine. « Tu trembles, carcasse ! Pauvre carcasse ». - Je comprends tout ce que tu dois ressentir en voyant nos pauvres blessés, il en est dont les plaies sont si affreuses. Mais il est bon de se dominer et cela apprend à nous mieux connaître. ...Je pense bien à toi, à mes Bons Petiots, à vous tous. Oui, quelle -épreuve, quelle séparation. Comme c’est long ! Enfin, ayons confiance, le Bon Maître et la Très-Bonne-Vierge m’ont tant protégé jusqu’ici.
23 Mai 1915.
Hier je n’ai pu t’écrire, ayant eu un ordre de mission pour V... Je suis parti à 4 heures du matin. J’ai profité de ce voyage pour faire quelques achats et j’ai fait adresser un envoi de dragées à Jean et à Madeleine. Aujourd’hui, Pentecôte... Quelle triste journée. J’ai un cafard monstre et traîne après moi un ennui profond. Quand nous reverrons-nous, ma pauvre Suzanne ? Quand reverrai-je ma Madelon, mon Jean, quand vous reverrai-j e tous, quand repasserons-nous en famille tous ces jours de fête ? C’est long, long, horriblement long. Enfin, ayons encore quelque patience, l’Italie se joint à nous, d’autres neutres suivront très certainement le mouvement pour donner le coup de massue à l’horrible nation teutonne. ...Je ne t’écris pas plus longuement car voici l’heure du courrier et je vais aller à Vêpres. Ce matin, j’ai eu le bonheur de pouvoir communier. Je pense bien à vous tous, trop s’il est possible de parler ainsi... car je m’ennuie horriblement.
...Pour les photos-cartes avec ma binette, sac au dos, fais m’en refaire 25, tout le monde m’en demande une, depuis le commandant jusqu’à mes hommes. Je ne pourrai contenter tout le monde, mais si cela est possible, je serai content de faire plaisir à certains. ...C’est très bien ce que tu envoies aux enfants de mon ordonnance. Cela leur fera plaisir, c’est un bon bougre qui se mettrait au feu pour moi. Du reste, tous les hommes et gradés de la Compagnie sont charmants avec moi, j’ai la confiance de tous, et en toutes choses, même personnelles, ils me demandent conseil. …Pour le taube venu au-dessus de St-Denis, je t’ai dit que j’avais reçu ton pneu du 13 le 16. Je ne savais pas qu’il y avait un camp d’aviation au Bourget. Ici les aéros sont moins nombreux mais plus dangereux, car sans compter les éclats d’obus qui nous reviennent lorsque l’artillerie tire sur eux, les obus qu’ils nous attirent en nous signalant, les bombes et projectiles qu’ils nous envoient, il y a aussi cette petite fléchette dont je t’adresse un modèle dans mon paquet. Ils nous les envoient par paquet de 500 et de la hauteur où ils sont, ce petit bout de ferraille traverse un homme et un cheval de part en part. ...Aujourd’hui, cela va un peu mieux, je me sens plus gaillard, je suis moins triste. Du reste, j’ai communié de nouveau ce matin et j’y ai puisé de la force, du courage et de la résignation ! Mais mon Dieu ! Ayez pitié de nous, cette séparation est longue, infiniment longue. - Demain matin nous repartons aux avant-postes. Espérons que cette période se passera mieux que l’autre. - Je te quitte ma Bonne Grande, embrasse mes Petiots avec tout mon cœur et continuons à prier avec ferveur le Bon Maître. ...J’ai écrit à Mère ce matin et je reçois à l’instant sa lettre du 19. Surtout tranquillise-la. Pauvre Mémé.
25 Mai 1919.
Je suis à mon poste depuis 3 h. 1/2 du matin et te mets cette carte avant le départ du courrier pour que tu ne t’inquiètes pas. Il fait un temps magnifique et les bois seraient superbes s’ils n’étaient pas aussi abîmés, mais malheureusement, plus un arbre n’est debout. Tout est fauché, haché, c’est un véritable spectacle de désolation.
26 Mai 1919.
Je viens d’écrire à ma tante P... et à Louise et profite de l’accalmie relative de ce matin pour faire mon courrier, car la journée d’hier à été trop calme pour que cela dure, il est vrai que la petite frottée que nous leur avons donnée avant-hier a dû les calmer. De plus les journaux et les proclamations leur annonçant la déclaration de guerre de l’Italie à l’Autriche, que nous leur avons lancés hier dans leur tranchée, ont dû leur faire faire de salutaires réflexions. C’est égal, la bête est dure à tuer et combien nous pouvons regretter les utopies de nos gouvernants radico-socialistes qui nous avaient si peu préparés. Enfin, encore de la patience et du courage toujours et nous y arriverons bien. ...Bon courage, nous avons l’un et l’autre notre lutte à soutenir, en l’acceptant sans révolte notre soumission nous attirera certainement de grandes grâces. - J’arrête, car voilà la danse qui commence et chacun à son poste... - L’intermède à été très varié et l’échange continue. Mais voici l’heure du courrier qui approche et je tiens à ce que ma lettre parte. Ne t’inquiète pas, il fait un temps superbe et je suis en parfaite santé. Je pense bien à vous tous et trouve le temps bien bien long, horriblement long.
27 Mai 1915.
Reçu hier ta bonne lettre du 22. Comme elles sont les bienvenues ces chères missives et avec quelle impatience je les attends. Aujourd’hui je n’ai pas le temps de t’écrire longuement. Ne t’inquiète pas, je suis en parfaite santé. Il fait un temps superbe, mais quelle chaleur. Heureusement que nous avons nos terriers où règnent la fraîcheur et même l’humidité, mais toujours pas de rhumatismes.
28 Mai 1919.
Rien de nouveau, tout va bien, je suis en excellente santé, mais toujours très occupé. Je n’ai pas une minute pour t’écrire bien longuement.
Tu me reproches de ne t’avoir envoyé que des cartes et de ne pas avoir écrit à Mère depuis 8 jours et à Paulette depuis 15. Ces deux derniers reproches m’étonnent et la poste en est certainement cause. Quant à ne t’avoir envoyé que des cartes durant quelques jours, c’est très possible, mais si tu savais quels durs moments nous avons passés et combien je fais l’impossible pour ne pas vous laisser sans nouvelles, tu comprendrais que cela est déjà bien beau et qu’il m’était matériellement impossible d’écrire plus longuement, si tu savais souvent dans quelles conditions et comment je t’écris. Ici, nous n’avons pas un moment de tranquillité ; même au repos ceux-ci sont rares. Quant au B... des C... la vie y est intenable, étant soumis à un bombardement incessant. Souvent les communiqués nous font rire lorsqu’ils relatent des combats de bombes et de grenades. Dans ce cas nous devrions être tous les jours au communiqué car en plus des bombardements d’artillerie, cette lutte de bombes, de grenades, d’obus de tranchées, de torpilles et de minenwerfer, est au B... des C... de tous les instants. Nous avons tant de projectiles à consommer journellement et ce qui n’a pu l’être un jour, vient augmenter la provision du lendemain. Il y a des journées où nous n’arrêtons pas et dame..., il y a la réponse du berger à la bergère. Tu me dis : « Vos tranchées doivent être terminées. » Ceci est une erreur, en matière de fortification et de défenses, il y a toujours mieux à faire, de plus, tu t’imagines bien que tous ces explosifs nous font de grands dégâts. Il faut donc toujours refaire, réparer, reconstruire et lorsque nous ne le pouvons de jour, vu la proximité de nos lignes, il faut le faire de nuit. En tout cas, soyez bien assurés, les uns et les autres, que je fais tout ce qui est matériellement possible de faire pour ne pas vous laisser sans nouvelles. Par moi-même, je sais qu’une longue lettre est plus agréable à recevoir qu’une courte carte, mais si vous saviez combien je profite du plus court instant même pour ne vous écrire qu’un mot et dans quelles conditions Je le fais souvent, vous vous demanderiez comment j’ai pu y arriver. Je voudrais que tu voies dans quel état est le pauvre B... des C... et notamment dans mon secteur. Ce n’est plus qu’arbres brisés et trous d’obus, je t’en envoie du reste une photo, tu pourras juger. Ne t’inquiète pas, je suis très bien portant, un peu fatigué seulement par moment. - Tu as bien fait d’envoyer les enfants à Chaponval, tu devrais le faire plus souvent. Pauvre Madelon qui voulait revoir Chaponval. Quand pourrons-nous le revoir tous ensemble ? Quels jours heureux nous passerons et avec quel plaisir j’irai entendre la Messe et communier à la chapelle des Carmélites. Ce matin, nous avons eu Grand’Messe, toujours dans la grange, et j’ai communié. Du reste, durant les quatre jours de repos, je communie aussi souvent que cela m’est possible, souvent trois et même quatre fois. Ah ! Quelle consolation et quelle force le Bon Maître m’a donnée en m’accordant la Foi. Je ne saurai jamais assez lui en rendre grâce. Voilà le mois de Marie presque terminé. Voici celui du Sacré-Cœur. Puissent Notre Bonne-Mère et Jésus répandre sur notre malheureux pays des flots de grâces et nous donner cette victoire si chèrement payée. Puissent-Ils me protéger et me rendre bientôt aux affections qu’ils ont bénies et à tous ceux que j’aime tant.
31 Mai 1919. ...Ce matin, j’ai profité du repos pour aller à l’hôpital des grands blessés à 8 kilomètres d’ici, visiter un de mes hommes. Le malheureux a été opéré 4 fois en huit jours et devra l’être de nouveau car il fait de l’ostéite. Il était bien heureux de me voir et tout fiévreux qu’il était m’a fait beaucoup de fête. Je l’ai recommandé à son infirmier, c’est un bon soldat très brave et souvent même très téméraire. Une heure avant qu’il soit blessé, je l’avais e…é, c’est le mot, il -était monté sur un abri à quelques mètres des tranchées boches. Je lui ai donné quelques francs et une médaille du Sacré-Cœur. Puisse le Bon Maître en avoir pitié et le rendre aux siens. Il est d’autant plus digne d’intérêt qu’au moment de l’occupation de Lille par les Allemands, il était en convalescence ayant eu la jambe cassée et que pour leur échapper, il s’est enfui de Lille par les égouts. - Tu as raison, garde ta belle confiance dans le cœur du Divin Maître. Néanmoins, il ne faut pas nous révolter lorsque nos prières ne sont pas exaucées. Nous sommes quand même et toujours trop terrestres. La plupart de nos désirs, de nos aspirations, se rapportent à notre existence ici-bas. Mais qu’est-ce que la vie ? « Une flèche qui part, une feuille qui tombe, une fleur qui se fane. » Nous voyons toujours sous cet angle très petit, Dieu voit différemment. Il nous promet la vie éternelle et nous oublions trop que pour aller à la vraie vie il nous faut passer par la mort. Mettons-nous donc sous la protection du Divin Maître et de sa Très Bonne Mère, mais prions surtout pour notre pauvre France. Sans dédaigner les alliés qui nous viennent en aide, ce sont surtout ces deux alliés tout-puissants qu’il nous faut à nos côtés pour nous donner la force, le courage, la ténacité et nous conduire à la victoire. Élevons nos cœurs et comme Jeanne d’Arc, répétons : Jésus, Marie. - Je comprends combien la mort de votre pauvre blessé vous à peinées et combien la douleur de sa malheureuse Mère vous a émues. Pauvres Mères ! Pauvres Femmes ! Il vous faut à toutes du courage, beaucoup de courage et dans le malheur vous dire : Ils ont fait leur devoir, ils ont travaillé pour la France et donné leur vie pour nos enfants. - Je suis heureux que l’obus rempli de dragées ait fait plaisir aux enfants. Je l’avais trouvé moi-même très bien et c’est pourquoi en passant, j’étais entré pour leur faire envoyer.
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